Avec ses séries de romans, Jody Picoult a prouvé depuis longtemps qu’elle excellait comme narratrice. Maintenant, elle écrit un livre intitulé « Pardonne-lui » dont les personnages sont eux-mêmes des narrateurs. Ce livre est rempli du style particulier de Picoult, sa façon de se servir des mots et sa capacité à faire de n’importe quelle histoire un récit moderne et innovant. Ceci est très important parce que le sujet de « Pardonne-lui » est l’Holocauste, un sujet qui a été examiné dans à peu près toutes les manières possibles et imaginables.
Le personnage principal de « Pardonne-lui » est Sage Singer, une jeune femme meurtrie par le chagrin et qui participe à un groupe de soutien. Elle est dans ce groupe à cause du décès récent de sa mère. Cette dernière est morte à la suite d’un accident de voiture dans lequel Sage était au volant. L’accident a laissé des cicatrices profondes sur le visage de Sage, d’où sa réticence à apparaître en public. Aussi, elle accepte un emploi de boulangère qui lui permet de travailler de nuit et échapper ainsi aux yeux de ses semblables.
Dans son groupe de soutien, il y a aussi un enseignant retraité du nom de Josef Teller. Il est assez âgé, mais au fil de leurs réunions il se prend d’affection pour Sage et la considère peu à peu comme une amie. Plus tard, il lui demandera de l’aider à mettre fin à ses jours. Elle est bien entendu horrifiée par cette demande, mais ensuite il lui révèle qu’il servait dans l’Armée d’Hitler pendant la Seconde Guerre mondiale et qu’il a fait des choses horribles aux Juifs.
Sage n’est pas une Juive pratiquante à l’instar de sa grand-mère. Cette dernière faisait également partie des gens de confessions juives qui ont été persécutés pendant la guerre. Alors que Sage essais de prendre sa décision concernant Teller, il commence à lui raconter son histoire. En parallèle, sa grand-mère lui raconte également son histoire. Ces deux histoires, racontées du point de vue de la victime et du bourreau, aident Sage à prendre sa décision.
Picoult est une narratrice si magistrale que les deux histoires prennent vie de façon éclatante à travers les pages du livre. Les horreurs de la guerre sont révélées avec force détails, mais l’impact de ces récits est, en quelque sorte, muet. Nous savons que ces deux personnages ont survécu malgré tout ce qu’ils ont pu vivre. Ceci rend leurs histoires moins pénibles à lire.
Sage est aussi un personnage qui attire de la compassion. Elle est indécise, pleine d’insécurités et en contradiction avec sa vie. Sa sérénité, face aux histoires qu’elle entend, rend le récit aussi plus facile pour le lecteur et lui évite de tomber dans la passion. Tout du moins, on arrive à naviguer dans l’histoire sans être aussi touché et horrifié face à tant d’horreur.
La patte particulière de Picoult est toujours présente : l’attention portée aux détails, le point de vue narratif de plusieurs personnages plutôt qu’un seul, et une touche finale qui sera une surprise pour certains lecteurs.